La libération de Pont de l'Arche en 1449
Par un chroniqueur de l'époque
Mathieu De Coussy.
(transcrit par l'abbé M.Desdouits doyen de Pont de l'Arche )

Pierre de Brézé , capitaine de Louviers , et avec lui Robert de Flocques , Bailli d'Evreux , Guillaume de Bigars , ayant avec eux quelques nobles hommes de leur compagnie , prirent leur  avis et imaginèrent comment il pourrait faire une entreprise sur la ville et le  château de Pont de l'Arche .
Ils s'en ouvrirent à un marchand de Louviers , nommé Guillaume Houel , lequel conduisait souvent des chariots et menait des denrées à travers le susdit Pont de l'Arche jusqu'à Rouen .
Quand ils eurent pris leurs résolutions , et qu'ils virent qu'il n'y avait pas de temps à perdre pour besogner là-dessus , Pierre de Brézé , accompagné de gens de pied , se mît en embuscade une nuit du coté de Port St Ouen , et Robert de Flocques et les autres , avec quatre cents combattants environ , se mirent dans un bois qui est assez prés devers Louviers ( la forêt de bord ) .
Et ce même jour , au mois de mai , le lundi d'avant l'Ascencion , le marchand Guillaume Houel alla passer avec une charrette ainsi que souvent il faisait , sur ledit pont , feignant de transporter des denrées à Rouen .
Et en passant il manda au portier du château que le lendemain au plus du matin , il voulut bien lui ouvrir la porte , qu'il lui donnerait du bon vin. Il ajouta qu'il était obligé de retourner de bon matin à Louviers pour y chercher de la marchandise . Puis il s'en alla vers Rouen .
Vers minuit il revint vers Pont de l'Arche , accompagné de plusieurs partisans qui se logèrent en une hôtellerie dans les champs , tout près du château .

Au point du jour , le marchand alla tout seul appeler le portier qui lui ouvrit la lourde porte .Alors deux hommes sortirent de l'hôtellerie pour venir au terre plein du rempart .Le portier se douta de quelque fraude quand il les vit , mais le marchand pour le rassurer , lui dit que c'étaient des gens de Louviers ; puis il jeta à terre pour son vin deux bretons et une plaque ( petites monnaies de l'époque ) ,  et comme il se baissait pour les ramasser , le marchand ( qui avait caché sous sa limousine de paysan des armes et un poignard ) ,  le tua et laissa sa charrette sur le pont-levis .
Son coup fait , il se mit à crier à pleine voix , appelant à l'aide les soldats français qui se tenaient cachés dans une maison du voisinage. Ceux-ci , à cet appel , accoururent en toute hâte à la porte où se trouvaient les trois hommes et , la mettent en état de défense , ils alertèrent à la trompe d'autres compagnons d'armes en beaucoup plus grand nombre , qui se dissimulaient à peu de distance dans des endroits obscurs .
Les  hommes du château entendirent ce bruit et l'un d'eus descendit en chemise , pensant tirer le pont-levis du dit  château .Mais le marchand se hâta d'aller à lui , et , comme il l'avait fait pour le premier , il le tua , bien que ce fut l'un des plus forts et des plus robustes de la garnison .
C'est ainsi que le château fut pris , puis tous s'en allèrent au bout du pont pour entrer dans la ville .Ils la prirent fort aisément , car la plus grande part des ennemis n'étaient pas encore levés .Il y avait dans la ville une garnison d'environ 120 anglais dont 8 à 10 furent tués , les autres furent faits prisonniers .

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